Première cueillette dans la plantation de thé de Nantes

Par Sylviane Brisson, Présidente du Club des Buveurs de Thé de Bretagne et Pays de la Loire.

Le 16 avril 2011 par une belle matinée de printemps ensoleillée et fraîche nous avons fait notre première récolte de thé à Nantes.
Nous sommes loin de l’Asie et de ses montagnes, de ses récoltes millénaires et traditionnelles, nous sommes à Nantes en France dans un des jardins de la ville, le Grand Blotterau.
Nantes est parmi les villes qui les premières en France ont fait le commerce du thé, de la soie, des porcelaines et des épices. C’était au XVIII e siècle un très grand port de commerce de la Compagnie Française des Indes, qui avait été fondée par Louis XIV en 1664. Il n’est donc pas étrange de trouver des théiers à Nantes.
Dans cette ville la culture du camélia est une véritable tradition ; chaque Nantais possesseur d’un jardin y a planté au moins un camélia ; les grands pépiniéristes en ont fait une spécialité et les exportent dans le monde entier. Mais de là à avoir une plantation de théiers il y avait un pas de plus à franchir….
Or la ville de Nantes est jumelée avec la ville de Suncheon en Corée du Sud depuis 2006. Déjà depuis1997 des liens d’amitiés profonds s’étaient noués et ainsi la ville de Suncheon a offert un «jardin coréen» à la ville de Nantes qui en retour a offert un «jardin nantais».
Dans ce jardin coréen une centaine de plants de théiers ont été mis en place en 2006 et ils se sont bien acclimatés et ont bien prospéré et poussé. Le climat maritime et doux de Nantes est en effet tout à fait favorable aux théiers.
Cette année le club des Buveurs de Thé s’est vu proposé d’en faire la première récolte. Imaginez le bonheur de ses membres qui vont procéder à la cueillette et préparer leur propre cru ! Bon c’est certain que rien n’était gagné car nous ne savions pas trop bien comment nous y prendre et constations que la théorie est bien loin de la pratique …
Donc par cette belle matinée fraiche du samedi 16 avril 2011 nous voila devant ces théiers qui ne sont pas encore majestueux ni même grands. Nous avons dû, à quatre pattes bien souvent ou accroupis, cueillir «le bourgeon et les 2 premières feuilles» de ces théiers. Mais quel bonheur et qu’elle émotion pour ces premières feuilles cueillies qui tombent dans notre corbeille. Nous avons ri aussi, comme d’habitude pendant les activités du club. Des curieux qui se promenaient sont venus nous voir : que pouvaient bien faire ces personnes penchées sur ces arbustes ? Nous avons expliqué et tous étaient surpris de savoir que Nantes possédait un champ de théiers. Deux journalistes avaient eux faits le déplacement spécialement pour voir le Club à l’ouvrage.
Après deux heures d’un travail «intense et acharné», non là il ne faut pas exagérer quand même ce fût plutôt un réel plaisir, nous avions récolté 900 grammes des feuilles d’un joli vert tendre, avec de beaux bourgeons.
C’est maintenant que commence le vrai travail de «l’usinage» : rendus chez l’un de nos membres habitant pas trop loin nous avons étendu notre cueillette sur un drap blanc pour la laisser flétrir pendant que nous nous restaurions et surtout que nous buvions du thé coréen apporté gentiment par Ju Pavageau notre correspondante de l’association Nantes/Corée du Sud.
Deux bonnes heures plus tard commence le travail de transformation plus qu’artisanal. Nous avons fait chauffer un wok (familial !!) et nous avons desséché le thé à feux vif. Là la méthode empirique a prévalu étant donné qu’aucun de nous n’avait fait cela auparavant. Beaucoup de fous rires plus tard nous avons enfin goûté notre production et là, est-ce la chance des débutants ou bien notre savoir faire, le résultat dans la tasse est concluant.
Sans prétendre de rivaliser avec les grands crus de thés notre thé du printemps de Nantes s’apparente au shincha, avec un goût frais, long en bouche, un peu iodé. Bon il n’était pas tout à fait assez sec mais nous ne sommes que des néophytes et nous avions peur de le faire trop griller. Nous avons terminé notre journée fiers et heureux de notre «exploit»et chacun a emporté sa petite boite de thé avec lui.
«Vivement l’année prochaine et une nouvelle cueillette» c’est ce que nous pensions tous en nous quittant, contents d’avoir encore une fois partagé des moments de grande convivialité, satisfaits d’avoir réussi ce pari presque impossible au départ étant donné notre totale manque d’expérience.
Mais qui ne tente rien n’a rien !