Le Lapsang Souchong, un thé noir de Chine très apprécié en France. |
Dans cette contrée montagneuse l’hiver est froid et parfois enneigé ; il y règne un climat humide et brumeux. La forêt y est dense et les théiers poussent entre 1 000m et 1 500m d’altitude. Le paysage unique, très pittoresque et accidenté à été classé patrimoine mondial par L’UNESCO.
Rien d’étonnant que les thés qui poussent dans cette région soient aussi particulièrement savoureux et d’une forte typicité. J’ai pu visité une usine approvisionnée en théiers sauvages et que l’on ne cueille qu’une fois par an au printemps ce qui explique le prix très élevé de certaines récoltes fines : il s’agit là des Lapsang Souchong préférés des maison Royales de l’Europe. Les récoltes moins fines sont donc plus accessibles. Une trentaine d’unités de production existent dans cette région assez reculée, toutes regroupées autour du village de Tongmu. Une partie des entreprises est privée une partie appartient à l’état. Dans cet environnement très rural les constructions sont simples, le séchage se fait dans des grandes granges en bois, les ateliers de fabrication ne sont pas très modernes, les fours de séchage alimentés en bois de résineux sont fortement patinés et embaument et charbonnent un peu. Dans les bureaux sont disposés les nombreux certificats de conformité, surtout ISO et BIO établis par des organismes allemands, suisses et japonais. On nous dit qu’au Japon un Lapsang en bouteille – «ready to drink», RTD – fait fureur.
Notons que le vrai nom attribué à ces thés noir vers les années 1750 est «Zheng Shan Xiao Zhong» et que le territoire de production est limité avec précision autour du village de Tongmu. La «libération» du commerce du thé suite au traité de Nanjing, qui clôt la première guerre de l’opium en 1842 entraîne une forte hausse de la demande de thés noirs par les Britanniques. Les producteurs de thés noirs des contrées avoisinantes ont alors cherché à tirer bénéfice de cette forte demande pour en fabriquer aussi. Toutefois en reconnaissant la spécificité du terroir, du climat, des théiers et du processus il est alors convenu que les thés cultivés en dehors du canton de Xincunxiang ne pourront s’appeler que Waishan Xiaozhong, c'est-à-dire des thés cultivés en dehors de cette région délimitée. |
Lors de ma visite nous étions accompagnées d’un chef des gardes forestiers, qui était en train de rédiger un ouvrage centré sur la production des ces thés «bohea», comme les appelaient les Européens – le wuyi se transformant en bohea – et il s’exclamait à plusieurs reprises avec une certaine rage à l’encontre de Robert Fortune «le voleur». C’est en effet précisément dans cette région du Fujian que le botaniste écossais, voyageant en mission pour la Couronne britannique avait collecté de nombreux plants, boutures et graines de théiers en pensant encore que les thés noirs provenaient de plantes autres que les thés verts. C’est un peu plus tard que des moines lui avaient montré comment faire des thés verts et des thés noirs en utilisant les feuilles d’un seul et même arbuste.
Ce sont ces théiers du Wuyi shan qui sont donc les ancêtres d’une partie des plantations installées depuis 1840 environ dans les contreforts de l’Himalaya, où ils produisent les thés noirs fins et célèbres de Darjeeling.